Je savais à peu près comment ça allait se dérouler j’avais vu un tas de gens y passer et quelques-uns s’en sortir. On a bien cru au départ pouvoir lutter en utilisant les vaccins existants, historiques ! Rien à faire ! Les chercheurs ont cherché et la plupart ont trouvé que dalle sinon la faucheuse ! On a expérimenté un tas de produits qui pouvaient marcher pour d’autres maladies et qui avaient eu quelques effets sur les bestioles de labo. Rien à faire !

J’ai commencé par m’isoler pour pas refiler la vérole aux copains et à la famille. J’avais équipé la petite maison que l’on occupait avec Mic. J’ai essayé de le foutre à la porte mais il m’a fait comprendre que ça se passerait très mal si j’insistais. Kimiko a fini par piger qu’elle ne me rendrait pas service en s’exposant près de moi et j’étais assez préoccupé pour n’avoir envie que de choses banales, pas question de se livrer au déchaînement des sens. En dehors du goût et de l’odorat, tout marchait bien et j’ai eu quelques jours pour me préparer. Je savais ce qu’il ne fallait pas avaler et j’avais regroupé tous les médocs que je pensais utiles ou qui étaient réputés tels : la colchicine (pourquoi pas), un vieux cocktail d’anticorps que le Laboratoire Roche avait élaboré des lustres auparavant, j’en avais assez pour un mois si j’arrivais jusque-là. Pareil pour les corticoïdes, j’avais autant de dexaméthasone que j’en voulais et je ne manquais pas de trucs pour douleurs et fièvres genre paracétamol, ibuprofène etc… Les antiviraux classiques ne me faisaient pas défaut et tous ces produits étaient accompagnés de protocoles écrits pour suivre la posologie adéquate ! Des trucs pour l’asthme, ou pour la démence précoce(!) ou pour l’arthrite !!!! Si le concentrateur d’oxygène ne suffisait pas, je disposais de bouteilles d’oxygène pur en pagaille et le dispositif qui va bien pour sniffer la chose. Tout était installé depuis trois jours quand je me suis retrouvé le cul par terre sans pouvoir bouger. Mic m’a foutu au pieu en rigolant, moi je trouvais moins de saveur à la mésaventure. Une semaine après il a fallu brancher le concentrateur, j’arrivais à bouffer, tout avait le goût de papier crépon et l’odeur de rien, je pouvais marcher un peu pour aller aux gogues par exemple. Devant la baraque ça défilait pour avoir des nouvelles. Petit à petit je sentais que j’étais en train de récupérer et je me disais prudemment que peut-être… C’était sans compter sur une rechute possible. Ce qui ne manqua pas ! Même scénario me voilà vautré dans un coin de la pièce et je me retrouve au plumard par l’effet magique de la poigne miqueste ! Tout recommence en plus raide et je passe la semaine à me dire que ça y est. Et puis ça repart : en trois coups les gros je me retrouve debout, vaillant, presqu’en forme. Suffisamment en tout cas pour coller Mic dans les toiles à ma place. Il prend le relais en bon camarade. Il a rien dit mais il l’a senti venir comme moi. Là je savais ce qu’il fallait faire, même si ce n’était pas gagné d’avance. Mais ce salopard était beaucoup moins éprouvé que moi et en peu de temps je l’ai sorti de là. Au résultat on est restés bloqués à peu près une semaine de plus, soit environ un mois et demi en tout. On s’est retrouvés dehors au début d’un printemps qui s’annonçait radieux, on était maintenant à l’abri de cette cochilie il ne nous restait plus qu’à reprendre nos aventures pour risquer sainement nos vies ! Moi j’en ai profité pour rattraper mon retard affectif et Kimiko m’a bien aidé. Mais comme disait Kipling, ceci est une autre histoire !